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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 07:00

Facebook.jpgLa Révolution du Jasmin a tressé une couronne de lauriers au réseau social Facebook. Nous avons tous entendus, ici et là, les louanges médiatiques qui le classent désormais parmi les nouveaux porte-voix des peuples opprimés (pour le contre-argumentaire, voir l’article “Réseaux sociaux et révolution arabe”).

Partant de ce constat de puissance mobilisatrice, il n’est pas sage de faire l’économie d’une réflexion sur le rôle politique et démocratique du réseau social. En effet, comme toute puissance, Facebook ne devrait-il pas justement être soumis, ou se soumettre lui-même, à des règles de limitation de son pouvoir ? Que cela s’appelle “séparation des pouvoirs” ou “checks and balances”, c’est là le principe constitutionnel de base de toute démocratie depuis des siècles. Or, le réseau social dépasse souvent les attributions qui devraient être celles d’un média, ou d’un outil au service d’une communauté. Il se place hors du contrôle démocratique car il n’est jamais soumis à une Loi fondamentale, document de principes qui l’auto-régulerait.


Voici donc quelques arguments qui militent, à mon sens, pour l’édiction d’une charte politique dont l’objectif serait d’éviter trois possibles dérapages :


L’omnipotence d’un « Réseau-Nation »


Vous vous dites sûrement que seule une puissance étatique devrait se soumettre à des règles constitutionnelles. C’est vrai. Oui mais voilà, la thèse d’un réseau social dont la nature institutionnelle ne serait pas très éloignée de celle d’un État-nation, ne cesse de se confirmer. Nous l’affirmions en 2009 dans l’article “L’ère des réseaux Nations”, dans lequel nous constations que la définition politico-juridique de l’Etat nation collait très bien à la peau du réseau social. Depuis, ce processus d’étatisation s’accélère : Facebook a ainsi vu sa “population” grimper de 325 à 650 millions d’âmes. Facebook accapare aussi petit à petit les attributs de l’Etat régalien, en se dotant par exemple d’une monnaie. Pierre Bellanger (le fondateur du réseau Skyblog), dans un article récent sur “L’avenir des réseaux sociaux”, explique très bien cette prise de pouvoir des attributs régaliens par les réseaux, notamment via le levier transactionnel :


Un service de réseau social est un État virtuel sous l’autorité et le contrôle de son propriétaire qui en édicte les lois d’usage, traduites en code informatique ; ce qui en garantit l’application. Le service en vient naturellement à assurer des fonctions régaliennes de sécurité et de police allant jusqu’à la peine de mort virtuelle : le bannissement du réseau social. Dans ce contexte étatique, le service est amené à créer sa propre monnaie développée d’abord généralement sur les jeux, pour s’étendre ensuite à des partenariats avec des annonceurs. La monnaie virtuelle est destinée à devenir convertible en devise réelle, dotant les jeux de gains attrayants. La monnaie peut être employée, enfin, pour les transactions entre les utilisateurs et en complément des transactions réelles. De fait, le service se constitue en puissance économique par le pouvoir d’achat collectif de ses membres dont il contrôle l’accès sur le service. Qui dit État dit impôt. Celui‐ci prend ici la forme d’un prélèvement sur toutes les transactions intervenant sur le service : entre les commerçants et les membres et entre les membres eux‐ mêmes. Le service de réseau social fusionne ainsi des fonctions rémunératrices de la carte bancaire, du groupement d’achat et de l’État. »

 

L’autoritarisme : “Car tel est notre bon plaisir”


Cette formule royale inaugurée par François 1er sied parfaitement à l’absolutisme de la direction de Facebook. Les perpétuels changements de CGU (Conditions Générales d’Utilisation) sans consultation sont monnaie courante. Plus exactement, Facebook s’était prêté un moment à un exercice de démocratie, comme nous l’avions expliqué dans l’article “L’ère des réseaux nations”:

“Ces 4 critères (Ndlr : de la définition de la Nation selon Renan) sont incroyablement condensés dans cette vidéo de Facebook Site Governance, dans laquelle Mark Zuckerberg (le Président / PDG /Monarque de Facebook) invite pour la première fois la population Facebook à voter. Le trait le plus caractéristique de cette vidéo est sûrement que vous ne la trouverez nulle part ailleurs sur le web: ni sur Youtube, ni sur un blog, nul part… Mark Zuckerberg s’adresse exclusivement à la population Facebook, sur son territoire, en invitant à un nouveau principe de gouvernance tout en renforçant le sentiment d’appartenance au réseau”

Sans convaincre tout à fait les utilisateurs, comme le prouve par exemple cette jacquerie virale qui a eu lieu sur le réseau pas plus tard qu’aujourd’hui :

Mais il y a encore plus grave : lorsque des règles semblent établies, le respect de leur application dépend du bon vouloir de Facebook. Un exemple frappant est celui des règles de promotion des marques sur le réseau, édictées dans le “promotion guidelines”. Outre le fait que sa compréhension nécessite l’exégèse des community managers gérant la marque (pourquoi pas, Bonaparte ne disait-il pas qu’une “bonne Constitution doit être courte et obscure” ?), le pouvoir de police (le service commercial de Facebook, en fait) qui en contrôle la bonne application est totalement injuste : ainsi, la marque Kiabi a vu sa page fan fermée (bannissement décrit par Bellanger) pour non respect des règles, alors que d’autres marques totalement hors la loi continuent à officier sur le réseau… Face à une justice à deux vitesses pour les marques, on est en droit de poser la question pour les politiques. Même si aucun cas de “bannissement” politique n’est avéré, en l’état rien n’aurait pu empecher Facebook de déclarer brusquement et unilatéralement que la page de Ouattara n’était pas conforme tandis que celle de Gbagbo l’était, ou vice et versa, selon son bon plaisir.


L’esprit partisan

Cette projection nous amène au troisième élément en faveur d’une constitutionnalisation. Facebook a en effet franchi un cap en organisant le Town Hall de Barack Obama il y a quelques jours. On peut bien sûr s’enthousiasmer pour cette nouvelle façon de s’adresser aux électeurs, ou encore s’extasier sur la cravate de Mark Zuckerberg, comme l’ont fait certains commentateurs… Mais tout de même, ce dispositif pro-Obama induit une question lancinante : Facebook invitera t’il le candidat Républicain à un Town Hall comme il l’a fait pour Obama ? Il faut avoir conscience que Facebook n’est plus le simple outil social qui a permis à Obama de se faire connaitre sur le web en 2008. Facebook est en 2011 l’organisateur d’un show politique digital avec Zuckerberg en présentateur star…

 

 

En guise de conclusion, une dernière remarque qui a son importance : une Constitution n’existe pas sans pouvoir Constituant (Une Assemblée Nationale, des Pères fondateurs, etc.). N’en demandons pas tant : une simple déclaration de principes ou une Charte de bonne conduite, même émise par Facebook, suffirait à éviter les trois types de dérapages évoqués ci-dessus : omnipotence, autoritarisme, partisanerie…

 

 

 

Source : NetPolitique, le 25 mai 2011.

 

 


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commentaires

F
<br /> Bonjour,<br /> <br /> Vous êtes cordialement invité à visiter mon blog.<br /> <br /> Description : Mon Blog(fermaton.over-blog.com), présente le développement mathématique de la conscience humaine.<br /> <br /> La Page No-19: ÉCONOMIE !<br /> <br /> LA CRISE ÉCONOMIQUE C'EST QUOI ?<br /> <br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> Clovis Simard<br /> <br /> <br />
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